Peu d’associations viennoises peuvent se targuer d’une telle longévité ! « Les Amis de Vienne » fêtent cette année leur 120 ans, un âge qui sera dûment fêté pendant les Journées du Patrimoine les 21 et 22 septembre prochains. Retour sur ce parcours et les festivités annoncées par Jean-François Bec, président des « Amis de Vienne ».

Comment sont nés « les Amis de Vienne »…?


Jean-François Bec-Il faut remonter à 1903. Cette année là, Me Angéniol, un avocat viennois découvrait une affiche annonçant la vente d’une mosaïque romaine découverte dans la propriété d’un particulier de Saint Romain-en-Gal. Quelques mois après cette mosaïque était vendue à un amateur éclairé d’archéologie, le général le Beylié ; celui-ci en fit don rapidement au musée de Grenoble. Cette mosaïque est celle d’Hylas et les nymphes : elle est aujourd’hui exposée dans le hall d’accueil du musée de Saint Romain en Gal…

Quelle suite a été donnée ?

Avec d’autres confrères avocats et des amis amateurs d’archéologie, ces amoureux du patrimoine ont alors décidé de créer une Société Savante pour que Vienne ne soit plus pillée de ses trésors enfouis ! Les Amis de Vienne ont donc très précisément vu le jour le 17 février 1904, dans un salon du Cercle du Jeu de Paume à la Chambre de Commerce de Vienne. 
Ernest Bizot, conservateur du musée de Vienne, est alors élu le premier président, ainsi qu’une quinzaine d’administrateurs dont la moitié d’avocats ou avoués. Les premiers acteurs sont donc MM Bresse, Angéniol, Reymond, Sauvigné, Ogeret, Craponne du Villard, Lombard, Bonjean, Duret, Alleman, Frécon, Teste du Bailler…

Quel rôle s’est donné d’emblée l’association ?

L’association se dote de statuts dont l’article premier indique bien les buts recherchés : « L’association se propose de répandre la connaissance de l’histoire de la ville et des antiquités viennoises, de protéger contre toute atteinte la beauté du paysage et des monuments viennois, de contribuer à aménager et enrichir les musées de la ville, d’attirer à Vienne le plus grand nombre possible de visiteurs et de rendre la visite de la ville facile, agréable et instructive. Elle vise aussi à contribuer à l’enrichissement culturel de ses membres ».


Au cours de son histoire, cette volonté de protection du patrimoine viennois s’est-elle révélée efficace ?

Oui, un exemple : très vite les Amis de Vienne sont alertés par une autre vente de mosaïque. Une cagnotte permet alors de rassembler les 300 F contribuant ainsi à l’achat de la mosaïque du Châtiment de Lycurgue ; celle-ci aussi est elle aussi actuellement exposée au musée de Saint-Romain-en-Gal. La législation concernant la législation des fouilles, depuis, a heureusement changé.


Et depuis, tout au long de cette histoire.. ?


Il serait fastidieux de citer tous les sauvetages, interventions, démarches que les Amis de Vienne ont réalisé pendant ces 120 années .
Pouvez-vous cependant citer les « sauvetages » les plus marquants au fil de l’histoire de l’association ?
En 1908, décision est prise d’aider à la restauration de la cathédrale Saint-Maurice alors en mauvais état ; Les Amis de Vienne ont organisé une souscription nationale qui recueille 17 500 F, soit la moitié de la somme nécessaire ; le reste étant apporté par l’Etat, sollicité par les élus et les responsables locaux. Les travaux seront effectués après 1920 du fait de la guerre.


L’association n’ a-t-elle pas aussi joué un rôle dans le dégagement du théâtre antique ?

Effectivement, en 1911 les Amis de Vienne ont participé au dégagement du théâtre antique par l’achat de terrains qui le recouvrent rue du cirque. Là aussi, les travaux ne débuteront que plusieurs années après et le « nouveau » théâtre antique sera inauguré le 30 juillet 1938 par le président Félix Lebrun.


Vous êtes aussi propriétaire immobilier..?

Oui, effectivement, en 1920, les Amis de Vienne ont acheté une série de trois maisons insalubres, rue de la Table Ronde, pour les démolir et dégager ainsi la façade sud de l’église Saint André le Bas ; ces travaux laissent alors apparaître la façade de ce qui deviendra le siège social des Amis de Vienne quelques années après et sera identifiée comme étant la maison du Chamarier (intendant) de l’église Saint André le Bas, Jean de Bernard au début du XVIIe siècle, grâce à l’écusson découvert sur la façade.

Quel autre rôle ?

Sauvegarder notre patrimoine, c’est bien, mais le faire connaître c’est bien aussi ! Les Amis de Vienne, dès 1905, ont repris l’idée d’un Syndicat d’Initiative (SI), déjà créé quelques années plus tôt mais dont le fonctionnement était inexistant. Les Amis de Vienne vont le développer, l’enrichir, le relier aux autres SI de la région (Lyon, Grenoble, Valence, …) ; ce SI va éditer des guides, des cartes pour faciliter la visite de Vienne et de ses monuments. C’est vers 1938 que le Syndicat d’initiative sera repris par la municipalité, sous la houlette de Lucien Hussel. Ce SI est toujours à l’œuvre maintenant et participe grandement sous un autre nom au rayonnement de Vienne.

Et encore ?

Nous organisons aussi des voyages culturels pour visiter des sites remarquables, souvent archéologiques, proches de Vienne (Lyon, Nîmes, Arles, Montbrison, …) Parfois ce sont des voyages de plusieurs jours vers des sites plus lointains (Bretagne, Chantilly, Conques, …) voire à l’étranger (Milan, Madrid, Emilie-Romagne, Amsterdam, Stockholm, Saint-Pétersbourg …)

Vous avez également un site Web où désormais et c’est nouveau, on peut consulter vos archives.. ?

Toutes nos activités sont régulièrement rapportées dans le bulletin qui paraît à partir de 1905, avec une périodicité d’abord aléatoire puis trimestrielle depuis plus de 50 ans. De très nombreux auteurs (on en dénombre plus de 300) ont ainsi publié de très nombreux articles (environ 1000) sur des sujets intéressant le patrimoine de Vienne et de sa région. On peut également relever des articles sur la vie des Viennois, la vie ouvrière et le syndicalisme, le parler « Gauchon » ; de plus la publication des tables générales des articles, permet de retrouver les auteurs, les sujets … Par exemple, on relève l’article prémonitoire de Jules Formigé en 1924 sur le théâtre antique, dix ans avant son dégagement! Tous ces articles (soit environ 10 000 pages !) sont consultables sur internet, depuis notre site (https://www.amisdevienne.fr) et la rubrique bulletin.


Comment allez-vous fêter ces 120 ans ?

Pour marquer ces 120 ans, nous proposons dans notre local, 5 rue de la Table Ronde, une exposition de principaux objets remarquables que nous détenons, à l’occasion des Journées Européennes du Patrimoine les 21 et 22 septembre prochains.
Enfin, comment voyez-vous l’avenir des « Amis de Vienne » ?
Après 120 ans d’existence, que prouver de plus ? La défense de notre patrimoine est une action de tous les jours : alerter concernant les dégradations de monuments, promouvoir ce patrimoine local en le faisant connaître par des visites, des conférences, des articles dans le bulletin, poursuivre notre rôle d’intermédiaire entre particulier et pouvoirs publics, faire connaître notre action pour que Vienne reste une ville où patrimoine et modernité cohabitent harmonieusement, transmettre aux générations suivantes notre passion pour le patrimoine….

-Il faudrait ajouter que les Amis de Vienne, dans le cadre des Journées du Patrimoine, organisent une visite guidée de l’église St-Martin samedi et dimanche de 14 h à 17h et proposent à la vente leur fascicule paru sur cette église.

La Maison du Chamarier, siège des Amis de Vienne, 3 rue de la Table Ronde.
Visite libre : Maison de l’intendant du couvent de Saint-André-le-Bas, accolée au bâtiment dont la façade Renaissance a été classée Monument Historique en 1984. À l’intérieur, à découvrir une exposition d’œuvres et de documents anciens du fonds de l’association, pour commémorer les 120 ans des Amis de Vienne. Samedi et dimanche de 14 h à 17 h 30.