Une forme d’avertissement.
« Le Rhône n’est pas inépuisable » lance l’Agence de l’eau qui vient de publier une importante enquête sur le présent et l’avenir du fleuve. Pas très réjouissante car elle montre que le fleuve va aussi être fortement impacté par le changement climatique. Lui-même, mais aussi ses usages.
On ne le voit pas, car, sur 80 % de la longueur du Rhône, la baisse des débits ne se traduit pas en diminution des hauteurs d’eau car les lignes d’eau sont maintenues par les 26 barrages du fleuve aménagé, mais le débit du fleuve Rhône ne cesse de baisser.
Déjà – 13 %
Les débits d’étiage moyens ont déjà diminué de 7 % à la sortie du Léman et de 13 % à Beaucaire, en Camargue. Et les projections climatiques estiment une baisse de l’ordre de 20 % supplémentaires en 2055 des débits moyens d’été à Beaucaire !
Pourtant, à son embouchure, son débit moyen est de 1 700 m3/s ce qui en fait le fleuve français métropolitain le plus puissant.
La baisse des débits d’étiage sera même beaucoup plus forte sur certains affluents du Rhône, de l’ordre de 40 % en moyenne pour l’Isère et 30 % pour la Drôme et la Durance.
Les prélèvements vont s’accentuer
A proximité de l’embouchure du Rhône, la part des volumes d’eau prélevés dans le fleuve au plus fort de l’été représente actuellement 15 % de son volume d’écoulement. Sans avoir à ce stade d’incidence significative pour l’équilibre écologique du fleuve, cette valeur n’est pas négligeable et traduit le fort niveau de sollicitation par les usages préleveurs.
Cette part d’eau prélevée a déjà pu dépasser les 30 % pour les périodes exceptionnellement sèches comme au printemps 2011. Cette situation rarement observée (2 années sur 30) pourrait devenir fréquente dans les prochaines décennies, et certaines années, dépasser les 40 %.
Il se réchauffe
Autre conséquence du changement climatique : le Rhône se réchauffe.
Depuis 1970, la température moyenne de l’eau du fleuve a déjà augmenté de +2,2 °C au nord à +4,5 °C au sud (+0,6 °C par décennie) sous l’effet conjugué de l’augmentation de la température de l’air et de l’implantation des centrales nucléaires de production d’électricité en période de basses eaux devrait s’aggraver.
La température devrait encore augmenter de 1,1 degré d’ici 2055.
Pour l’Agence de l’eau : « l’avenir du Rhône se prépare. Il importe dès aujourd’hui de réfléchir à des stratégies spécifiques afin de rendre les usages du fleuve moins tributaires des situations de plus faible écoulement, l’été notamment. Les producteurs d’énergie sont concernés. La baisse des débits en été conjuguée au réchauffement de l’eau génèrera des contraintes de fonctionnement accrues pour les centrales nucléaire. Cette baisse devrait également se traduire par une diminution de la production des centrales hydroélectriques installées au fil de l’eau ».
Conclusion de cette étude par Laurent Roy, directeur général de l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse : « Le Rhône restera à moyen-terme un fleuve puissant, avec des débits en général élevés, mais il n’échappe pas à la question du partage de la ressource en eau. Sous l’effet du réchauffement climatique, le fleuve Rhône ne peut plus être géré comme une ressource inépuisable. C’est l’un des principaux enseignements de cette étude. La recherche de pratiques plus sobres et la lutte contre les gaspillages sont utiles pour l’avenir. »